7 clés du conflit entre l’armée vénézuélienne et les groupes irréguliers colombiens

Les affrontements entre l’Armée Vénézuélienne et des groupes colombiens irréguliers dans l’État frontalier d’Apure durent depuis plus de deux semaines

Por Anais Lucena

08/04/2021

Publicado en

Francés

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Les affrontements entre l’Armée Vénézuélienne et des groupes colombiens irréguliers dans l’État frontalier d’Apure durent depuis plus de deux semaines. Ces affrontements armés ont entraîné le déplacement de civils, la mort de huit soldats des Forces Armées Nationales Bolivariennes (FANB), des attaques contre des organismes publics au Venezuela, des attaques aux mines terrestres et un déluge d’accusations mutuelles entre Caracas et Bogota.

Alors que le gouvernement vénézuélien accuse la Colombie d’avoir négligé la frontière pour faciliter l’activité des organisations criminelles et «tercériser» un conflit avec le Venezuela, depuis la Casa de Nariño, on accuse Miraflores de protéger une faction de la guérilla pour lui donner le contrôle du territoire et en faire une voie pour le trafic de drogue.

1- Pourquoi le conflit entre l’armée vénézuélienne et les irréguliers colombiens a-t-il commencé ?

Le gouvernement vénézuélien a lancé il y a 15 jours une opération militaire dans l’État frontalier d’Apure pour lutter contre la présence de groupes irréguliers colombiens, appelée «Bouclier Bolivarien».

Ce déploiement visait à détruire les camps de ces organisations irrégulières, liées au trafic de drogue et à la violence armée, qui tentent de s’infiltrer dans le pays par la zone frontalière, en l’absence apparente des autorités colombiennes. En fait, Caracas accuse Bogota d’abandonner délibérément sa vigilance dans la zone binationale et de fournir même un soutien logistique à ces cellules terroristes.

2- Quels sont les groupes illégaux que l’Etat vénézuélien combat ?

Bien qu’il n’ait pas été précisé officiellement de qui il s’agit, on parle de plusieurs camps de dissidents des Forces Armées Révolutionnaires de Colombie (FARC), aujourd’hui disparues, ainsi que de l’Armée de Libération Nationale (ELN) et de groupes paramilitaires.

Sur les photos rendues publiques sur les médias sociaux, on peut voir plusieurs insignes des FARC et des vêtements militaires. Le ministre vénézuélien de la Défense a toutefois précisé que les groupes que l’armée combat sont de nature diverse et ont des objectifs criminels différents (extraction illicite d’or, de terres rares, trafic de drogue), et que l’armée les combattra tous de la même manière.

3- Quel a été l’impact de la confrontation ?

Le rapport le plus récent des autorités vénézuéliennes précise que les attaques contre les campements irréguliers ont entraîné la destruction de six camps, la mort de neuf irréguliers, la mort de huit soldats vénézuéliens et la blessure de 34 autres, et la capture de plus de 33 personnes accusées d’appartenir à ces organisations illégales.

4- Qu’est-il arrivé à la population civile et à l’armée vénézuélienne ?

Selon les autorités vénézuéliennes, l’opération a été menée en dehors des zones urbaines. Cependant, l’escalade des affrontements a provoqué le déplacement d’une partie de la population civile de La Victoria vers la ville colombienne d’Arauquita.

Après le déplacement, le gouvernement colombien a publié un communiqué pour exprimer sa «préoccupation» face à cette mobilisation et pour exiger une présence internationale dans la région.

Il existe des versions contradictoires sur ce point. Alors que le Venezuela accuse les groupes irréguliers d’intimider la population pour qu’on se démobilise, comme cela arrive souvent en Colombie (où le nombre de personnes déplacées a triplé cette année), Bogota assure que la raison de ce départ est l’opération militaire vénézuélienne.

La divergence se situe également au niveau du nombre de personnes déplacées. Le gouvernement colombien affirme que 5.000 personnes ont été déplacées de La Victoria à Arauquita, mais la projection de la population de cette ville vénézuélienne pour 2021 ne dépasse pas 3.500 habitants. À ce sujet, le ministre vénézuélien des affaires étrangères, Jorge Arreaza, a ironisé : «c’est étrange, ces mathématiques médiatiques».

5- Pourquoi n’y a-t-il pas de coopération entre les armées vénézuélienne et colombienne ?

Malgré plus de deux semaines d’opérations dans la zone, il n’existe à ce jour aucune coopération en matière de sécurité entre la Colombie et le Venezuela.

«Toute la violence et tous les maux de la Colombie arrivent au Venezuela et il n’y a personne pour contrôler», a dénoncé le ministre vénézuélien de la Défense Vladimir Padrino López, qui a estimé que l’objectif de l’inaction de la Colombie est d’«tercériser» le conflit par le biais des groupes irréguliers, de la parapolitique et du trafic de drogue, des fléaux qui affectent le territoire colombien depuis plus d’un demi-siècle de guerre, et qui se sont aggravés malgré l’accord de paix signé avec les FARC éteintes en 2016.

Bogota, pour sa part, maintient une position hostile à l’égard de Caracas, dans la lignée du mépris pour le gouvernement du président Nicolas Maduro, consolidé en 2019 après l’autoproclamation de l’ancien député de l’opposition Juan Guaidó comme président «intérimaire» du pays. Depuis lors, il n’y a eu aucune démarche publique de quelque nature que ce soit.

6- Quelle est la situation actuelle au Venezuela ?

Le gouvernement vénézuélien a déclaré que la situation se normalise dans la région, mais a annoncé des «mesures extraordinaires» dans trois municipalités de l’État d’Apure : Páez, Munoz et Romulo Gallegos. L’objectif est de restreindre la circulation et de renforcer les contrôles migratoires afin de détecter tout mouvement de ces groupes irréguliers vers son territoire.

À cette fin, une «zone opérationnelle spéciale temporaire de défense intégrale» a été activée, dans laquelle des plans de sécurité publique seront mis en œuvre pour encercler les migrants irréguliers. Des itinéraires et des horaires seront établis pour le trafic terrestre, aérien et fluvial, ainsi que pour l’exploitation des lieux publics et privés.

Parmi les contrôles de la mobilité, les citoyens devront informer à l’avance les autorités des changements de résidence et des départs ou entrées dans le pays. Les autorités pourront procéder à des inspections des propriétés, expulser les occupations illégales et intervenir pour rétablir le libre passage dans les zones urbaines et rurales, s’il est interrompu.

En outre, il a été demandé à l’ONU de collaborer au processus d’élimination des mines antipersonnel posées par les irréguliers, et de servir de médiateur avec le gouvernement colombien afin de «travailler ensemble» aux efforts de protection des frontières.

Le Ministre des Affaires Etrangères Arreaza a réitéré sa demande d’utiliser le mécanisme de «back channel» (petite porte) des Nations Unies pour coordonner les actions de sécurité avec la Colombie, et a regretté que Bogota n’ait pas voulu fournir d’informations pour procéder à la capture et au combat de ces groupes irréguliers, malgré le fait que le gouvernement d’Ivan Duque ait accusé à plusieurs reprises Caracas de protéger ces organisations.

De même, le titulaire des Affaires Etrangères a demandé au gouvernement du Mexique – qui préside actuellement la Communauté des États Américains et des Caraïbes (Celac) – sa médiation pour «ouvrir des canaux de communication» avec la Colombie, conformément au mandat de cette organisation qui consiste à maintenir la région comme une «zone de paix». Il a également déclaré qu’il était disposé à dialoguer avec la Ministre Colombienne des Affaires Etrangères, Claudia Blum, tout en reconnaissant que les efforts déployés par Caracas pour établir un dialogue de haut niveau avec Bogota n’ont pas abouti jusqu’à présent.

7- Quelle est la position de la Colombie ?

Jusqu’à récemment, Bogota s’était contenté d’accuser le gouvernement de Maduro d’être une «dictature» et de discréditer les actions des FANB. En outre, le ministre colombien de la Défense, Diego Molano, a réaffirmé, dans une interview accordée à El Tiempo, que l’armée vénézuélienne aurait attaqué la faction narcoterroriste ‘d’Ivan Mordisco’ afin de céder la région aux dissidents de l’ELN et des FARC, des accusations que le Ministre des Affaires Etrangères Arreaza avait déjà qualifiées «d’absurdes, fantaisistes et schizoïdes».

Sans apporter de preuve, Molano a assuré que l’objectif du déploiement des FANB n’était pas de protéger la frontière mais de «protéger le trafic de drogue», alors que la Colombie est le principal producteur de cocaïne au monde, que les groupes irréguliers qui opèrent dans cette zone frontalière sont tous d’origine colombienne et que le Venezuela est un territoire exempt de cultures illicites.

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